Je me demande si mon incapacité à entretenir une relation normale avec un homme ne serait pas due à mon manque affectif. Seulement, j’ai peur de passer à côté d’une vie de couple et surtout d’une vie de mère. Pourquoi est-ce que je tombe toujours amoureuse des hommes qui n’en ont rien à faire de moi ?
Aimer les hommes qui ne vous aiment pas est un merveilleux moyen d’éprouver des sentiments authentiquement romantiques. Les amours romantiques sont toujours malheureuses, et ce, par définition. Et cultiver ce malheur permet de vivre des choses intenses, alors que le bonheur d’être à deux a tendance à s’enliser dans un banal quotidien, un mélange des brosses à dents.
On évite aussi, grâce à cette stratégie, la confrontation à une relation de longue durée, aux efforts relationnels que cela représente, puisque cela tourne toujours court.
La vie à deux, en fait, consiste en une construction commune, celle d’une nouvelle entité, le couple. Il faut pour cela accepter de négocier, de transiger. On part du principe qu’on va chercher à faire plaisir à l’autre, à le contenter, afin que cet autre ait le désir de nous faire plaisir, de nous contenter, et que de cette façon, les flux s’équilibreront. Construire son couple n’en finit donc jamais. Et sans cette générosité négociée, il n’y a pas de couple qui tienne ni qui vaille.
Mais vous parlez aussi de votre manque affectif. Ce qui me fait suspecter chez vous l’existence de ce que j’ai appelé le syndrome de Groucho Marx. Notre ami Groucho a dit un jour : « Jamais je n’accepterais de faire partie d’un club qui voudrait d’un individu tel que moi pour membre », ce qui devient, pour ce qui nous occupe : « jamais je ne pourrais aimer quelqu’un qui aurait mauvais goût au point de m’aimer. »
Lorsqu’on manque d’estime de soi, qu’on se dévalorise, on dévalorise aussi ceux qui s’intéressent à nous et, peut-être, seraient prêts à nous aimer. Au contraire, on trouve bien plus intéressants ceux qui ne nous aiment pas et qui ne nous aimeront jamais, ceux qui ont le bon goût de ne pas nous aimer, ceux qui prouvent leur valeur en nous dédaignant.
En voilà, une bonne façon d’être malheureuse en amour !
Au contraire, les personnes ayant une bonne estime d’eux-mêmes partent du principe opposé : une personne qui s’intéresse à moi est forcément intéressante, et si je ne vois pas immédiatement en quoi, il me suffit de chercher un peu, d’approfondir la relation, pour le découvrir.
Peut-être pourriez-vous partir de ce principe, et regarder autour de vous, à la recherche de ces personnes apparemment sans le moindre intérêt, mais chez qui vous éveillez de l’intérêt. Donnez-leur une chance !