Votre enfant n’est pas paresseux, il aime apprendre. Il n’est pas mal noté, au contraire… Pourtant un matin, il vous annonce qu’il ne veut pas aller à l’école. Vous le questionnez: est-il malade, craint- il une mauvaise note, a-t-il peur d’un professeur, de moqueries ou d’agressions d’autres enfants?
Non, dit-il, rien de spécial c’est juste que, aujourd’hui, il ne veut pas y aller, se sent mal…il ne peut pas. Votre insistance inquiète réussit à le faire sortir de la maison, vous vous voyez le trainer jusqu’à la porte de l’école où il s’écroule en pleurs, en état de sidération. De retour à la maison, il se calme et vous jure que demain, pas de problème, il y retournera. Mais le lendemain matin, même scène : maux de ventre, vomissements parfois. Il ne peut vraiment pas y aller. Passant en vain de la menace aux encouragements, l’incompréhension vous tombe dessus : vous n’avez rien vu venir – puis l’angoisse – que se passe-t-il ? Que faire ?
Les enseignants n’ont rien remarqué de spécial, ce qui ne vous rassure pas du tout ! Votre entourage, votre pédiatre, vos amis vous parlent de phobie scolaire, ce trouble de l’anxiété qui se produit inopinément à tout moment du parcours scolaire : reconnu comme tel, il donne lieu aujourd’hui à des analyses de plus en plus diffusées. Doit-on cependant toujours diagnostiquer une phobie scolaire ? Si oui, que faire dans ce cas ?
Refus scolaire anxieux ou phobie scolaire ?
Il ne faut pas les confondre. Le refus scolaire anxieux est le plus souvent lié à la peur de l’échec. Il s’agit d’une anxiété de performance massive, avec des manifestations physiques. On parle de blocage scolaire : l’enfant a peur d’aller à l’école, mais ne le refuse pas. Pression sociale, des parents, élitisme forcené : l’enfant a l’angoisse de ne pas être à la hauteur, donc de ne pas être aimé. Au Japon, où la compétitivité est poussée à son maximum, plus de la moitié des consultations psychiatriques sont motivées par le refus scolaire anxieux et la mésestime de soi.
La phobie scolaire est aussi une manifestation extrême de l’anxiété à l’école. Mais ce n’est pas le travail scolaire qui est en cause, c’est le lieu qui cristallise son angoisse. Les attaques de panique, au moment où à la seule idée de franchir les portes de l’école, malgré sa volonté sincère d’y aller, génèrent de nombreuses manifestations physiques souvent spectaculaires. Les aides donc ne relèvent pas de la même approche.
Evitez la panique, mais une règle d’or : compréhension, bienveillance et …action !
Comprendre la phobie scolaire dans la bienveillance
Les causes diffèrent selon la personnalité de l’enfant et son histoire propre, mais le plus souvent la phobie scolaire est :
– Le prolongement d’une anxiété sociale, suite de manifestations d’angoisses de séparation dans la petite enfance.
– La conséquence d’une peur concernant la santé de ses parents (suite au deuil récent d’un proche, la maladie d’un parent …) L’enfant a besoin de ne pas s’éloigner pour surveiller si tout va bien.
– D’une peur liée à un traumatisme subi à l’école (agressions, rackets, violences morales ou physiques)
Bon à savoir : tous les enfants peuvent être atteints de phobie scolaire. Elle touche 2 à 5% des élèves dans les pays occidentaux. Votre enfant n’est pas le seul à qui « cela » arrive, ce qui favorise l’écoute des autres.
Ne lui exprimez pas de jugement. Ne montrez pas votre inquiétude. Assurez-le de votre compréhension et de votre accompagnement inaltérable, ainsi que de l’existence de moyens d’aide efficaces, quand bien même il n’est pas psychiquement en mesure de concevoir une issue. Cette issue, il la souhaite en toute sincérité, mais c’est la pensée de l’impossible qui anime sa phobie scolaire, en une logique circulaire destructrice : moins il va à l’école, plus il le redoute, et inversement.
Agir sans tarder
La phobie scolaire, quelque soit l’âge de l’enfant, doit être considérée dans sa nature grave et prise en charge rapidement.
Car plusieurs facteurs déterminent son évolution et donc les actions à mener auprès de professionnels de la santé psychique:
-du stade de la scolarité où elle survient (souvent à l’entrée en 6ème ou au lycée). Plus elle apparaît tardivement fin de collège, lycée), plus elle sera difficile à traiter et elle peut alors conduire à une déscolarisation et une désocialisation.
-de l’intensité de l’anxiété
-des troubles associés : cela va du trouble de l’estime de soi à une vraie dépression. Il peut avoir également une aggravation de maladies anciennes comme l’asthme, le diabète etc.
Les bons réflexes
– Osez en parler, le plus calmement possible, dès que le trouble s’installe et a été identifié.
– Allez sans délai avec l’enfant consulter un thérapeute (pédopsychiatre) : il a la charge d’identifier si l’enfant souffre d’une dépression ou non, et d’adapter sa thérapie. Il rassurera l’enfant, cherchera avec lui les raisons de sa souffrance et ils bâtiront ensemble une stratégie de retour à l’école ( les thérapies cognitivo-comportementales donnent de bons résultats )
– Prenez contact immédiatement avec les responsables de l’école, direction, enseignants. Procurez-vous les cours et les devoirs à faire à la maison : recourir à des cours par correspondance n’est pas une bonne idée dans le cas d’une phobie scolaire, car cela renforce l’isolement de l’enfant et peut aboutir à une désocialisation rapide. Faites plutôt appel à un accompagnant aux devoirs, étudiant ou professeur particulier à domicile, tout en précisant à l’enfant qu’il ne s’agit que de faire le passage avec le retour à l’école. Essentiel qu’il garde à l’esprit qu’il pourra y reprendre sa place : projection dont il a besoin.
– Maintenez – c’est primordial- le lien entre votre enfant et le lieu-école : complément au travail du thérapeute, des rencontres avec des partenaires indispensables, les professeurs ou le directeur, en dehors des horaires scolaires. La phobie scolaire et le désarroi familial qui l’entoure ne sont plus ignorés ou déconsidérés de tous les acteurs de l’école. Les rencontres aussi avec ses camarades à la sortie des classes sont pertinentes. Votre enfant doit comprendre que sa place lui est gardée et qu’on l’attend !
– Faites venir souvent ses copains chez vous (sous le prétexte de lui apporter les cours ). L’important est que l’enfant soit le moins possible déconnecté de son milieu social et scolaire.
– Enfin et surtout, évitez toute épreuve de force; injonctions et menaces seront improductives, voire crisperont gravement les choses. Veillez à ce que l’entourage de l’enfant, grands-parents, frères et sœurs, proches, adopte également cette attitude, mais aussi le distraie du problème.
Evitez-lui au mieux la culpabilité d’être la cause de bouleversements dans la cellule familiale. Votre réassurance, votre volonté sans faille de l’accompagner dans cette épreuve et votre confiance dans son succès à retourner à l’école sont vos meilleurs atouts, apportant leurs effets heureux à la mobilisation coordonnée de tous les membres de son entourage affectif et professionnel.