INTERNET, EN FAIT, COMPLIQUE LA RENCONTRE.
« Aujourd’hui, les hommes comme les femmes ont des exigences extrêmes. Les sites de rencontres entretiennent l’illusion qu’un autre idéal nous attend, un autre qui collera parfaitement à nos envies », note Sylvain Mimoun, gynécologue-andrologue (3). Ces rêves romantiques explosent au contact de la réalité. Autre hic, les stéréotypes ont moins évolué que les hommes. D’un côté, il y a le cliché de l’homme musclé, viril, fort ; de l’autre, des hommes androgynes, neutralisés. Si les femmes exigent que leur compagnon partage les tâches ménagères avec elles, elles attendent que la rencontre amoureuse les cueille, les excite, les exalte… Et, surtout, les emporte loin des préoccupations quotidiennes. Autre écueil encore, avec la multiplication des accusations de harcèlement, les hommes osent moins draguer et finissent par perdre le mode d’emploi de la séduction.
L’ENGAGEMENT FAIT PEUR AUX HOMMES COMME AUX FEMMES.
Le couple, synonyme de négociation, d’adaptation, de conciliation, contredit nos sacrosaintes aspirations à la liberté individuelle. « Chez les trentenaires, la norme semble être : on s’éclate ensemble, on s’entend bien, mais, dès qu’on est dans l’intime, on perd ses moyens », remarque Philippe Hofman, psychologue clinicien (4). Une appréhension paralysante qui conduit de plus en plus d’hommes à consulter pour des troubles sexuels. Des pannes et des angoisses qui traduisent des doutes, des problèmes d’estime de soi, des pulsions infantiles selon le psychologue, qui précise qu’« il n’y a plus de regard social sur le couple. Seul prévaut l’intime amoureux, qui peut rimer avec enfermement, rendant difficile la construction de chacun ». Du coup, on évite les fusions anxiogènes et on papillonne. Enfin, les bénéfices de la vie en couple sont beaucoup moins évidents qu’autrefois. Pour ces garçons élevés par des mères féministes, capables de laver leur linge ou de passer l’aspirateur, l’autonomie ménagère plaide en défaveur de la vie commune. « C’est l’un des effets surprenants de l’égalité, explique Daniel Welzer-Lang, sociologue (5). Ayant appris à gérer l’espace domestique, les hommes estiment avoir moins besoin d’une compagne. » La trahison par le balai-brosse ? Peut-être, mais quelle chance de ne plus être courtisée pour notre habileté à le manier !
ALORS, LE CÉLIBAT EST-IL UNE FATALITÉ ?
Non, chacun et surtout chacune peuvent toujours faire la rencontre dont ils rêvent. Comment ? D’abord, peut-être, en acceptant de lâcher prise et en accordant de la place au hasard. L’amour ne se définit pas comme un produit, on ne choisit pas un homme comme un jean ! Se donner une chance de rencontrer un bon compagnon, plutôt que le bon, c’est déjà bien. S’ouvrir à l’autre sans le juger sur la couleur de ses chaussettes ou sur son humour moyen, c’est mieux. Se décoller de son écran pour fureter dans le monde, laisser la vie décider, accepter le rythme de l’autre, être à son écoute sincèrement, ne pas régler de vieux comptes… autant de pistes qui paraissent évidentes mais qui sont de plus en plus éloignées de notre comportement quotidien. Sophie a essayé. Elle a fermé son compte Meetic, s’est fiée au hasard et a rencontré Philippe, 47 ans, cousin d’amis et divorcé. Depuis, ils ont emménagé ensemble et ils ont la vie devant eux…
(1) Auteur de « Les Réseaux du coeur. Sexe, amour et séduction sur Internet » (François Bourin).
(2) Auteur de « Transmettre (ou pas) » (Albin Michel).
(3) Coauteur de « Côté coeur, côté sexe » (Albin Michel).
(4) Auteur de « L’Impossible Séparation » (Albin Michel).
(5) Auteur de « Nous, les mecs » (Payot).