Amalgamer « amour » et « défi »

Cette notion de « défi », Patricia Delahaie estime qu’elle n’a pas grand chose à voir avec l’amour. « S’aimer, c’est se faire du bien, c’est fabriquer du bonheur. Lorsque l’on est dans une espèce de compétition, dans un jeu de chat et de la souris, suis-moi je te fuis, fuis-moi je te fuis, on se situe plus dans une relation passionnelle, qui n’a souvent que peu d’avenir à long terme ». Pour la psychologue, « lorsque le schéma se répète sans cesse, que l’on multiplie les relations amoureuses toxiques qui font mal et que seuls les hommes ne nous aimant pas nous séduisent, il faut s’interroger sur ce que l’on cherche vraiment ».

« Souvent, les femmes qui craquent systématiquement pour celui qui ne leur conviendra pas ont eu à se battre durant leur enfance pour obtenir de l’amour et pensent inconsciemment qu’elle ne peuvent aimer et être aimées qu’ainsi, dans un esprit de conquête », analyse Patricia Delahaie. Isabelle 36 ans, et « championne du monde deschoix amoureux foireux » a quant à elle compris qu’en essayant toujours de conquérir « le garçon que tout le monde essaie d’apprivoiser », elle tentait de se rassurer sur son propre cas. « Il y avait quelque chose de très narcissique dans ma démarche, comme je n’arrivais pas à m’affirmer dans une bande et dans la vie, etre la petite amie du mec cool me donnait une stature. Sauf qu’en réalité j’étais son ombre, rien de plus. »

Une question d’hormones?

Et si, plus qu’une propension à choisir le mauvais garçon, les femmes étaient victimes de leurs hormones? C’est en tout cas ce que suggère une étude de l’Université du Texas, pilotée par la chercheuse Kristina Durante. Selon cette dernière, lorsque les femmes sont en pleinepériode d’ovulation, elles se sentent plus attirées par les beaux parleurs, un profil d’hommes qu’elles rejetteraient en temps normal. Inconsciemment, « les hormones associées à la fertilité les conduiraient à se faire des illusions sur ce type d’hommes et à penser que ces derniers pourraient être des partenaires dévoués et de meilleurs pères, sans s’interroger au préalable sur leur fiabilité ».

Croire qu’on va « pouvoir le faire changer »

« Ce qui interroge en réalité, ce n’est pas forcément cette attirance pour les bad boys – après tout, oui, parfois cela peut être un peu excitant de séduire le caïd de la bande – mais plutôt cette question: combien de temps on reste alors qu’il nous fait souffrir? » Parce qu’en effet, la « magie » du bad boy dure parfois plus qu’une folle soirée.

« Ce qui m’avait plu chez Yann au départ, c’était son côté chef de bande, raconte Sophie, 32 ans. Je m’étais inventée, je crois, que je le changerais, qu’il cesserait d’être cet indomptable écorché vif. J’ai mis trois ans à comprendre que je m’inventais des histoires. Non seulement en effet je ne l’ai pas changé mais surtout, je me suis rendue compte au bout de trois ans de vie commune qu’il n’était pas si séduisant. Voire même qu’il était un peu pathétique, à plus de trente ans, avec sa grosse moto et ses journées passées au bar plutôt qu’à chercher un boulot. Surtout, vivre avec quelqu’un dont on a sans cesse peur qu’il s’en aille, c’est épuisant. »

Aujourd’hui, après avoir congédié son motard, Sophie coule des jours tranquilles avec son nouvel amoureux, « beaucoup moins ténébreux mais gentil, tout en sachant exactement ce qu’il veut pour nous ». « Je découvre à quel point c’est bon d’avoir confiance, de ne plus me faire un sang d’encre qu’il m’annonce que finalement c’est terminé, qu’il a trouvé mieux ailleurs. Et le quotidien avec lui, je ne le trouve pas ennuyeux mais doux et reposant« .

La gentillesse, une qualité pourtant hautement désirable

« L’idéal, confirme Patricia Delahaie, c’est peut-être un gentil, avec du caractère. Je crois que les femmes n’aiment pas fondamentalement les mauvais garçons. Ce qui n’est pas très séduisant peut-être, c’est l’incapacité à prendre des initiatives ou des décisions, ce qu’on pourrait qualifier de mollesse. Mais l’honnêteté, la gentillesse, la tendresse, ce sont des qualités hautement désirables ». Et de conclure:« Il faut se vouloir du bien en amour, avant tout! » Un mantra qu’Isabelle a fait sien depuis sa rencontre avec David. « Il n’est pas celui que l’on va remarquer en premier, mais lui me remarque justement, et me rend enfin heureuse ». Et si la maturité amoureusefinalement, c’était cela, désirer quelqu’un qui nous fait du bien?

(1) Ces amours qui nout font mal, Comment guérir d’une relation toxique? Patricia Delahaie, éd. Marabout