Comment s’organise la relation ? Y’a-t-il un contrat ? Des limites ?

G. : Je considère, pour ma part, que je suis en couple avec ma copine, et, sans parler de « contrat », il est clairement établi entre nous que nous nous laissons la liberté de vivre d’autres relations, sexuelles ou affectives. Dans mon histoire, nous avons quelques règles, qui peuvent évoluer : par exemple, lorsque l’on part en soirée ensemble, on rentre ensemble. Nous nous mettons aussi au courant des relations que nous commençons si elles impliquent des sentiments et des répercussions sur notre histoire. Pour ce qui est des simples expériences sexuelles, je ne tiens pas à ce qu’elle me raconte tout dans le détail. Par contre, si je pose une question, je sais que j’obtiendrai une réponse honnête. Tout le monde ne fonctionne pas de cette manière. Je connais d’autres couples polyamoureux qui préfèrent tout se dire, ou encore prévenir en avance lorsqu’un nouveau partenaire potentiel entre en jeu.

Avez-vous rencontré des difficultés par rapport à la manière dont vous gérez vos relations ?

G. : Pour des raisons pratiques, de gestion du temps notamment, il peut être compliqué d’entretenir plusieurs relations dans un même espace géographique. Il ne faut pas non plus croire que les relations polys sont toujours exemptes de jalousie. Il s’agit d’apprendre à la gérer, car on ne naît pas polyamoureux. Cette pratique est le fruit de questionnements sur la pertinence du couple monogame envisagé comme seul modèle légitime de relations. Le polyamour implique une réflexion sur un certain nombre de comportements intériorisés et considérés comme inhérents à la liaison amoureuse (possessivité, jalousie etc.). Dans mon cas, c’est au fil de rencontres et d’échanges que j’ai construit ma vision des relations telles que je les pratique aujourd’hui, en sachant que ma manière de les envisager peut évoluer au cours du temps. Une autre difficulté majeure est d’établir des règles en faisant en sorte qu’elles conviennent à tous les partenaires.

Mais les préjugés les plus tenaces viennent de l’extérieur : souvent, les relations polyamoureuses ne sont pas considérées comme de « vraies » relations, elles ne sont pas valables aux yeux de la société. Elles ne sont pourtant ni moins fortes, ni moins importantes ! Pour beaucoup, le polyamour ne serait qu’une « peur de l’engagement » due à une immaturité affective. Il est nécessaire de reconnaître la validité de tous les modes de relations, tant qu’ils font l’objet d’un accord entre les partenaires.

Au niveau de la famille, souvent attachée au modèle du couple traditionnel, il est difficile de faire son « coming out » de polyamoureuse. Les problèmes peuvent aussi venir, lorsqu’on est poly, d’un partenaire qui souhaite imposer l’exclusivité comme condition de la relation. Il y a souvent peu de négociation possible dans ce cas : la parole et les désirs de la personne poly seront a priori illégitimes car ils vont à l’encontre de la norme dominante en matière de relations.
*Gaëlle souhaite garder l’anonymat sur son nom de famille