J’ai fait l’amour tous les jours pendant un an et je ne vous ai rien dit.
Je n’étais même pas sûre d’aller jusqu’au bout, mais voilà, nous y sommes. *tapote la place vide sur le canapé*
Le fait est que je ne suis pas du tout à l’aise avec l’intimité. Je suis d’une famille peu démonstrative et parfois je déteste mon corps, le profil parfait de l’autiste. Mon mari est très beau et surtout très très sexy, mais tous nos problèmes venaient de moi. Je n’arrivais pas à calmer mes angoisses et le sexe était devenu un moment anxiogène qui ne pouvait finir que de deux manières.
1. Je l’évitais. C’était difficile et stressant de cacher mon corps sous deux édredons et une combinaison de ski dans le noir, alors je faisais diversion. J’ai des crampes. J’ai trop de boulot. Gigi a peur de dormir seule, prenons-la avec nous dans le lit. Oui, je me suis servie de ma fille de quatre ans comme barrage. C’est impossible d’avoir envie après avoir lu trois histoires de Martine, c’est tout simplement impossible.
2. J’essayais de lui expliquer pourquoi j’étais complexée. Il m’a demandée pourquoi je ne me satisfaisais pas de ses compliments sur mon physique. Je me suis sentie conne, très conne.
Après beaucoup de larmes et un curry de crevettes, l’idée m’est venue d’avoir des rapports sexuels tous les jours pendant un an, en évitant de penser aux éventuels problèmes de santé et de logistique. L’idée lui a plu. J’aurais aimé pouvoir dire que c’était une décision profonde, mais la vérité, c’est que j’avais peur qu’il s’intéresse moins à moi car j’agissais de manière désintéressée à cause de mon manque de confiance et il commençait à s’inquiéter à force de m’entendre dire des choses du genre « ça a l’air sympa de faire chambres séparées ? »
(Spoiler alert : je suis toujours pour les chambres séparées, car il ronfle et mâche dans son sommeil et il est contre la couleur verte et les édredons.)
Nous nous sommes rendu compte que si nous nous concentrions sur l’intimité, cela raviverait tout ce que, pendant les sept années suivant la naissance de notre fille, nous avons tâché d’éviter, sous couvert de fatigue et de manque de confiance. C’est ainsi que j’ai réussi à surpasser ma peur de manger des huîtres et de conduire dans la neige. Vous vous y collez jusqu’à ce qu’elles n’aient plus le goût de morve ou que vous n’ayez plus l’impression de ne pas contrôler le véhicule. Vous vous forcez à la faire jusqu’à ce que vous vous sentiez à l’aise. Vous vous forcez à le faire jusqu’à ce que soudainement vous aimiez ça.
Je ne peux pas parler pour Andy, à part qu’il en a vraiment profité, mais pour moi, cette année de sexe a eu pour but de faire comprendre à mon cerveau qu’il fallait assumer mon corps quand j’enlevais mes vêtements.
Les débuts ont été difficiles. J’étais tout le temps en train de me préparer. À la fin de la journée, je me penchais au-dessus du lavabo pour me nettoyer le visage en pensant à des draps frais et à une bonne nuit de sommeil, puis je me rappelais qu’il fallait encore faire l’amour et je me disais « super, une corvée quotidienne de plus à faire ».
Puis, au lieu d’être une corvée, c’est devenu le moment de la journée où j’étais le plus en paix. Le moment où je pouvais avoir une véritable conversation avec mon mari, où il m’écoutait au lieu de regarder la télévision par dessus mon épaule ou de jouer aux Lego.
J’en ai parlé à quelques amis et ils ont tous réagi de la même façon : « oh, je ne pourrais pas ». Et je comprends totalement, mais en réalité, j’ai appris de nombreuses choses sur moi-même entre les draps.