AMOUR IMPOSSIBLE : L’AVIS DE LA PSY

Qu’est-ce que l’interdit en amour ?

Sophie Cadalen* : Il n’existe aucun interdit réel, hormis celui, quasi universel, de l’inceste. Mais il en traîne toujours un au sein de la famille, autour de celui ou celle qu’on ne peut pas avoir : la sœur de sa femme, sa meilleure amie… On est un peu dans un inconscient incestueux, on flirte avec un interdit, en fait décrété seulement par notre imaginaire. Et l’intouchable devient encore plus désirable.

 

L’interdit nourrirait-il le désir ?

Oui. Alors qu’il aurait vocation à border notre désir, l’interdit a souvent l’effet inverse. Car le désir est toujours transgressif. Plus on se pose de lois, plus on est attiré. Tant qu’on jure que « jamais on ne regardera la sœur de sa femme », elle reste excitante. Ce n’est pas tant qu’on ait envie de cette femme-là, mais plutôt de dépasser, d’oser cette transgression.

 

Pourquoi y a-t-il ou non passage à l’acte ?

Ce qui va faire sauter le barrage, c’est la force du refoulement. Plus on s’est bridé, plus on risque de craquer. Dans beaucoup de familles, ça « dragouille » entre beaux-frères et belles-sœurs, il y a du désir fantasmatique, et on joue avec. On ne ferme pas définitivement la porte. La fermer, c’est donner une importance tragique, en faire quelque chose de prenant et de puissant. On a tout intérêt à aller au plus près de nos fantasmes : pour réaliser s’ils nous tiennent vraiment au cœur et au ventre. C’est souvent l’idée qui nous excite, plus que le passage à l’acte. L’amour né d’un interdit peut-il être heureux ? Oui, si on se concentre sur ce qui nous pousse dans les bras l’un de l’autre. Ceux qui arrivent à s’affranchir du regard des autres et vont au bout de leur choix, souvent, au fil du temps, convainquent leur entourage.

 

La notion d’interdit est-elle la même pour les hommes que pour les femmes ?

Oui. La différence est dans les codes sociaux. Longtemps l’interdit était surtout du côté des femmes. Aujourd’hui elles s’autorisent de plus en plus à être amantes, sexuées. Et on constate que plus elles affirment cette autorité et s’autorisent des choses, plus les hommes s’en interdisent.