Le manque
Ce sont d’ailleurs ces mêmes détails qui, un jour, nous révèlent notre désamour. Inès se souvient de ce matin où elle est entrée dans la cuisine alors que son mari prenait son petit déjeuner. « Sa façon de tenir sa tartine, les mots qu’il disait, l’odeur qu’il dégageait m’indisposaient.
Exaspérée, j’ai levé les yeux au ciel, mais quand j’ai surpris le regard de ma fille sur moi, j’ai eu honte. J’ai su qu’elle venait de comprendre, au même instant que je le comprenais moi-même et sans que j’aie besoin de prononcer le moindre mot, que je n’aimais plus mon mari. »
Pour Inès, le corps de son mari était devenu « de trop ». Or, aimer, c’est rechercher l’autre, puisque lui seul nous permet de nous sentir complet. « Ce que l’on recherche dans l’amour, c’est quelque chose qui nous manque sans que l’on sache ce qui nous manque, explique Alain Guy.
Mais l’autre, par sa seule présence, a ce don de nous apporter une plénitude qui nous rend léger, transporté, aérien. Le destin de l’être humain est de vivre dans un manque existentiel impossible à combler, et pourtant, aimer, c’est, malgré tout, demander à l’autre quelque chose qu’il n’a pas, mais que sa présence vient combler quand même. Raison pour laquelle Lacan disait : “Aimer, c’est donner ce que l’on n’a pas.” »